Comment manger du poisson sans piller les mers?

Des dizaines d’espèces sont menacées, et de grandes
enseignes de distribution commencent à les retirer des étals. Des
pêcheurs aux consommateurs, la Norvège est pionnière dans ce domaine.


Déjà plus de deux millions de spectateurs ont vu « Océans », le film-plaidoyer
de Jacques Perrin en faveur des mers. Pour tous ceux que la beauté
d’une raie manta ou la danse ondulante d’un banc de thons ont ému se
pose désormais un dilemme : comment faire le plein d’Oméga 3 et
continuer à manger 35 kg de poisson et de crustacés par an (la consommation moyenne des Français), sans pour autant contribuer à vider les mers ? « Dès maintenant, il faut consommer plus avec sa tête
et moins avec son estomac », répond le scientifique Philippe Cury*,
directeur de recherche à l’IRD (Institut de recherche pour le
développement).

Et d’énumérer pêle-mêle une dizaine d’espèces à ne surtout pas
consommer : « les petits requins, le caviar, le thon rouge, et tous les
poissons des grandes profondeurs tels que le grenadier, l’empereur, la
légine… »

Déjà, plusieurs enseignes de supermarchés ont annoncé avoir arrêté la
vente de certaines espèces. Accusés par Greenpeace de continuer à
commercialiser du thon rouge (issu de la pêche « artisanale »), les
Centres Leclerc viennent ainsi de retirer de leurs rayons le flétan
blanc, le siki ou la lingue bleue. Un geste suffisant ? Pas si sûr. «
Les consommateurs ne s’en rendent pas compte, mais les supermarchés
regorgent de petits requins. Ce sont des poissons pas chers. Une fois
coupés en darnes, ils sont mis à toutes les sauces et vendus sous des
noms variés comme la saumonette. En réalité, il s’agit de la roussette,
un petit requin à la reproduction très lente », explique Philippe Cury.


Autrement dit, faire son marché responsable requiert une bonne dose de
vigilance… Pour aider les clients, le Fonds mondial pour la nature
(WWF) édite un conso-guide que nous reproduisons ci-contre. « Depuis un
an, le label MSC a également fait son apparition sur les étals. On
trouve encore peu de produits labellisés MSC mais plusieurs pêches
françaises comme la sardine de bolinche (en Bretagne), le homard de
Basse-Normandie ou le lieu noir sont en cours de certification auprès
du WWF », explique-t-on à FranceAgrimer. Malheureusement, diverses
allégations environnementales, telles que « pêche durable », « pêche
artisanale », etc., ont fait florès.

« C’est la jungle des labels ! » proteste Philippe Cury, qui en appelle
d’urgence aux pouvoirs publics pour mettre de l’ordre. Le travail est
en cours : en décembre, la Direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a été chargée
d’une mission sur le sujet. Il devrait en sortir, fin avril, un rapport
très attendu.

* « Une mer sans poissons », de Philippe Cury et Yves Miserey, chez Calmann-Lévy.
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Source: Leparisien.fr
(26/02/2010)